jeudi 10 janvier 2013

La place du langage dans l'intervention policière - 2 / 3


Le risque mimétique


La police se trouve devant une double exigence, faire corps avec la société qu’elle défend, donc refléter la  diversité de sa composition en même temps qu’elle incarne un idéal intangible qui doit incorporer sinon supprimer les écarts. Ainsi faire corps avec la société n’implique pas l’adoption des mêmes usages, coutumes ou langages que les groupes qui la forment : mais une compréhension des codes de communication afin d’adopter l’attitude adéquate.


En Irak une des causes de la difficulté de compréhension entre soldats américains et population locale réside dans la « distance d’intimité », les américains s’adressent à un interlocuteur à environ 1m20 qui correspond à une distance de sécurité personnelle, or les irakiens pratiquent « le mélange des haleines », il faut s’adresser à son interlocuteur à 30 cm seulement – on voit ici un élément infime prendre une place vitale dans une situation de guerre.


 


 La parole policière :

Une bonne communication dépend d’une bonne compréhension du milieu extérieur. Avoir la réaction adéquate = s’inscrire dans un schéma communicationnel efficace.
Il s’agit de tenter de comprendre quelles solutions pratiques peuvent modifier la pratique policière pour apporter un surcroit d’efficacité ou de confort dans la pratique de l’activité policière.
Dans une situation d’interpellation lors d’un contrôle d’identité il faut garder des objectifs policiers précis :
-          Vouvoiement de ou des personnes même si ces dernières tutoient les policiers.
-          Accompagner l’interpellation d’une injonction orale : police, ne bougez pas ! ou « Police, coupez votre moteur » quelle soit ou non produite par des agents en uniformes.
-          Si les conditions de l’interpellation semble par trop « physique », il faut l’accompagner d’une explication : si la personne se dit « malmenée » ou « agressée » il faut répondre : « il s’agit d’une technique policière » – cette dernière visant à la neutralisation d’un individu initialement déterminé comme potentiellement dangereux pour les intervenants comme pour lui-même. Cela permet de dépersonnaliser l'action en la plaçant du côté d'une mise en œuvre technique nécessaire d'abord pour assurer la sécurité de tous y compris de la personne interpellée.
Il faut rappeler ici les recommandations du comité de surveillance : proportionner les méthodes d’interpellations à la présomption délictuelle
La parole doit ici être mesurée, elle doit subir un traitement « économique », c’est-à-dire créer un environnement sonore non plus habituel et commun, mais policier. Il ne faut pas lors d’une arrestation entrer dans un échange langagier ou dans l’interprétation, il faut mettre en place les moyens d’une coupure langagière qui ne permette plus, dans le cas des jeunes des cités par exemple, d’être en terrain connu.
L’utilisation d’une formule écran permet une neutralisation de l’effet de violence, exemple de la formule américaine « vous êtes en état d’arrestation, vous êtes en droit de garder le silence, tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous ». Cette formule modifie le cadre de l’intervention en faisant passer du simple contrôle à l’arrestation. Ce moment est celui où l’individu est maîtrisé par les agents, c’est le moment où tout le stress retombe, où le moment dangereux est passé, cette formule permet alors de « vider son sac » sous une forme codifiée et recevable .
La plupart des plaintes des jeunes des quartiers étant fondées non pas sur l’interpellation elle-même mais sur ses conditions :
            Utilisation du tutoiement
            Utilisation d’insultes ou d’injures
            Vexations ou humiliations


C'est vers ces éléments de langage que doivent se déployer les efforts.








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