mardi 25 décembre 2012

Langage des Z.U.S / synthèse








 Les Z.U.S (zones urbaines sensibles) possèdent des codes langagiers qui leurs sont propres. En ces lieux la violence est d’abord verbale, puis viennent les pierres. La violence symbolique (les mots) est donc le prélude à la violence réelle. Un commissaire de Police décrit ainsi l’utilisation du langage des jeunes préadolescents : « ils insultent avec des termes qu’ils ne comprennent pas, n’envisagent pas la teneur des termes ni la dangerosité de ce qu’ils disent, alors que ce sont des insultent pour celui qui les reçoit » : ce qui est ici notable c’est que la parole chargée d’insultes n’est pas comprise par celui qui la profère comme injurieuse, il peut s’agir d’un mode d’expression de son mécontentement lors d’un contrôle d’identité aussi bien que d’une communication considérée comme normale ou habituelle. C’est précisément cette capacité d’adaptabilité dont ne disposent pas ces jeunes, tant du point de vue du langage que du mode de réponse à une situation ressentie comme dérangeante. Le langage ordinaire renvoyant à des subtilités qui mettent en danger le jeune non assez doté linguistiquement pour répondre rapidement et efficacement il y a fabrication d’une sous-culture qui ne reprend pas les règles ordinaires de la communication. L’injure permettant aussi de mesurer un véritable pouvoir, celui de pouvoir mettre en dehors de lui n’importe quel adulte. Le langage codifié des jeunes implique une structure inventive de la langue toute entièrement tournée vers l’insulte – donc ce qui dans une société policée est considérée comme précisément la sortie de la civilité et de l’urbanité. Il y a inversion de la codification : il n’est pas rare d’entendre lors d’échanges entres jeunes des insultes de « mondanité » : pour se saluer on entend couramment un chapelet d’insultes et d’insanités comme marqueur d’une affection mutuelle. Le sol de la perception classique de l’injure est donc troublé : il faut retraduire le sens de la phrase à partir d’une compréhension situationnelle qui prend ici toute son importance. Mais ce qui se trouble à travers cet échange injurieux c’est aussi la valeur future que je dois accorder aux propos qui bordent mon  champ perceptif. Je dois abandonner l’idée d’une réaction stéréotypée à l’audition de tel ou tel vocable et me pencher sur mon expérience humaine pour décoder les rapports entres les personnes. Ce brouillage serait le moment de la perte de contact entre les générations. 


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